S’engager en faveur de la culture dans l’enseignement postsecondaire

La culture doit occuper une place privilégiée dans les programmes d'éducation, plaident les auteurs de cette lettre d'opinion.

PAROLE AUX LECTEURS / Les auteurs de cette lettre d’opinion sont Hervé Guay, Marie-Claude Larouche et Marie-Hélène Forget, professeurs à l’Université du Québec à Trois-Rivières et membres du Laboratoire de recherche sur les publics de la culture.


Le renforcement des liens culture-éducation bénéficie depuis quelques années d’un renouveau à la faveur de politiques et mesures ministérielles. En effet, la nouvelle politique culturelle Partout la culture du Gouvernement du Québec (2018) associant les ministères de la Culture et des Communications (MCC) et de l’Éducation (MEQ) incite les écoles publiques et les établissements d’enseignement privés à offrir à tous les élèves deux sorties scolaires annuelles gratuites en milieu culturel, pourvu qu’elles soient pertinentes au regard du Programme de formation de l’école québécoise.

Ces incitatifs s’ajoutent au programme La culture à l’école, lui-même accompagné du Répertoire Culture-Éducation, qui présente des ressources reconnues d’intérêt pour la classe. Puisque ces initiatives bénéficient au milieu scolaire primaire et secondaire, et comme elles favorisent le partage d’une culture commune, la réussite éducative et le plaisir d’apprendre des élèves, nous sommes d’avis qu’elles devraient être étendues à l’enseignement postsecondaire.

Au premier chef, il est urgent de rendre ces ressources disponibles en formation initiale à l’enseignement au préscolaire, au primaire et au secondaire, particulièrement pour les domaines des arts, du français et l’univers social bien sûr, mais également des sciences et technologies et de toute autre discipline scolaire. De telles mesures sont essentielles pour augmenter les contacts structurés et structurants entre les futurs enseignantes et enseignants et la culture.

Sans cette possibilité d’expérimenter la culture et de réfléchir à sa portée pédagogique dans le cadre de leur formation, il serait illusoire de penser que les personnes enseignantes puissent toutes remplir le rôle complexe, mais néanmoins essentiel à une éducation de transmettre la culture. Nous soutenons que la culture doit rayonner partout à l’école, comme le font les sports d’ailleurs, pour qu’au cours de leur passage à l’école, les jeunes puissent y avoir accès et qu’ils y prennent goût.

Ce faisant, la société québécoise pourra compter sur le fait que les universités forment bel et bien les enseignantes et enseignants au rôle de passeur culturel ainsi que le prévoit le Référentiel de compétences professionnelles en enseignement.

Les étudiants des collèges et universités qui suivent des programmes d’éducation aux arts ainsi que ceux et celles qui étudient dans des domaines près des arts comme les sciences humaines où la culture joue un rôle fondamental devraient aussi être ciblés. Nous pensons par exemple à l’histoire, aux communications, à l’anthropologie, à la sociologie.

Tant qu’à y être, pourquoi ne pas aussi inclure d’autres secteurs comme la gestion, l’économie, le génie, le droit, la santé et à la gestion? Nous contribuerions ainsi à créer une société plus riche où tout citoyen, toute citoyenne aurait eu des contacts répétés et de qualité, tout au long de son parcours scolaire et de formation, avec des acteurs, des objets, des pratiques et des établissements artistiques et culturels, voire technologiques et scientifiques.

Nous sommes convaincus qu’une telle éducation contribuerait à assurer non seulement la survie de la culture au Québec, mais surtout son épanouissement, tandis que nous évoluons dans une société marchande et mondialisée qui tend à faire rétrécir comme peau de chagrin la place des cultures nationales au profit d’une culture unique et impérialiste, qui circule sur les GAFAM.

Les cégeps et les universités ont besoin d’être appuyés pour y parvenir. Incitons-les donc à se servir du socle de la culture, comme d’autres font appel au sport par ailleurs, pour améliorer la qualité de la formation offerte.

À l’heure où l’institution à laquelle nous appartenons s’apprête à mettre en œuvre sa Politique des arts et de la citoyenneté culturelle et pendant que les budgets de la culture subissent des coupes, il nous apparait indispensable que le ministère de l’Enseignement supérieur rende accessibles ces ressources des programmes Partout la culture et La Culture à l’école et les étendent sans tarder à tous les programmes de formation en enseignement, puis à tous les ordres d’enseignement.

Ce n’est qu’à cette condition que nous réussirons la transmission de notre culture à ceux et celles qui nous suivent, et à ceux et celles qui nous rejoignent en cours de route de partout dans le monde. C’est aussi à cette condition que l’enseignement postsecondaire jouera pleinement son rôle de contribuer à la vitalité de la culture au Québec.